Aléa de la rupture n°1 : la case dépression boulimique. Cette
case est inévitable, inutile de lutter. Ma théorie : le corps a
besoin de sucre pour assassiner le chagrin via un bon gros choc
glycémique des familles. A l’heure où j’écris le combat fait toujours
rage.
Voilà
à quoi s’est résumé ma vie cette semaine. J’ai passé le seul
week-end ensoleillé de l’année à manger et boire. C’est tout.
Conséquemment, je ne ressemble à rien. Disons… Courtney Love. En
langage agriculteur, je suis en jachère. Le poil en liberté, la
chevelure sauvage et le visage totalement nu. Pas le moindre effort
esthétique à déplorer.
Disons-le carrément. Je suis en pleine zone “rien à foutre”.
Cette zone est dangereuse. Ma dernière crise de “rien à foutre” remonte
à mes 18 ans et mon tout premier frottement au dieu de la brûlure
indienne sur cœur juvénile j’ai nommé l’amour (ou l’attraction) via gus
quelconque affublé d’une guitare dont le sex appeal était inversement
proportionnel à la stupidité. La dose de douleur était minime comparée
au marasme dolorifère dans lequel je suis présentement fourrée. Mais le
désintéressement envers ma propre personne était le même. Ceci est bien
ma deuxième crise, les signes ne trompent pas.
J’ai pris deux kilos en trois jours. Mes cheveux
sont si emmêlés que la moindre intromission de ma main sur mon crâne
revient à quasiment perdre un doigt. Je suis sortie en pyjama dehors,
et j’ai trouvé ça super normal. J’ai écouté “Colorblind” de Counting
Crows 28 fois d’affilée. Je n’ai pas suivi le rituel Clinique trois
temps depuis belle lurette. J’ai regardé le nombre incalculable de
films pour filles et pour diversifier j’ai également regardé the
Machinist. Après son visionnage j’étais dans l’état d’un lemming
dépressif sur le point de sauter de sa falaise.
Bilan : Ouaip, on peut le dire, j’ai tout de la loque.
Hannah est en mode amie de première catégorie et
supporte tout mes discours de fille bourrée/énervée/lamentable (aucune
mention inutile) avec la patience d’une sainte sourde aveugle muette, à
l’odorat défaillant. Elle sourit et hoche la tête avec conviction à
chaque fois que je fais une pause respiration dans mon discours
intitulé “Sus aux mecs, sus à K, je songe à l’émasculer”. Elle a été
d’un grand secours en ce qui concerne ma vie internetale. Elle s’est
occupée personnellement de l’étape Facebook du processus de “va te
pendre libidineux personnage” alias ma séparation.
Mon statut est officiellement passé de “en couple” à “célibataire”.
Dans l’heure suivant cette annonce j’ai reçu quinze notifications qui
manifestaient toutes en substance la curiosité maladive de mes amis.
J’ai même reçu un “toutes mes condoléances” de la part de Tony mon
patron au Trinity’s Café. Hannah a répondu de façon classe et brève.
Aucune mention de l’affaire tromperie avec une membre de la ligue des
leprechauns. Pas la moindre envie d’être catégorisée “pauvre victime”
par l’entièreté de ma vie sociale.
L’annonce a également réveillé ma mère. J’ai reçu un appel hystérique estampillé “Mais pourquoi ?!!” Ici la retranscription de sa réaction suite au crachage de morceau.
“(Silence… ) Tu… tu es sûre ?
Il avait l’air d’un si gentil garçon. Il n’y a aucune erreur possible ?
Je veux dire, tu sais que tu as tendance à grossir les choses et en
faire tout un plat.“
Typique de maman. Je les ai vu en pleine action mais il y a certainement erreur.
Quand j’ai finalement réussi à la convaincre, j’ai eu droit à un autre
long silence et le truc le plus las que ma mère m’ait jamais dit: “Ne t’inquiètes tu finiras par trouver une personne qui te corresponds.” Ce qui a conduit à un autre cycle de dépression, rapidement endiguée par deux margaritas (une pizza et un verre).
K n’a pas appelé, pas une fois. Évidemment s’il
l’avait fait je lui aurais raccroché au nez. Ne pas avoir l’occasion de
lui signifier ma froideur mâtinée colère destructrice nuit gravement à
ma santé mentale et physique. Je suis tellement sur les nerfs que
j’engouffre quantité de nourriture calorifère. Je me sens grosse, moche
et débile. Je suis une patate sur canapé. Mais ceci est ma dernière
journée de loque.
Demain, je travaille, pas le choix. On m’a
gentiment signifié mon prochain chômage si je ne me ramenais pas. Et si
je peux être une fille émotionnellement en miette, psychiquement parlant
me voir en plus chômeuse c’est trop. Et jeudi, je dois aller chercher
mes affaires. K. devrait être hors de l’appart et j’aurais le champs
libre pour remporter tout mes trucs. Il y a urgence, je n’ai pour toute
vêture qu’une jupe orange et trois tee-shirts dont un à l’effigie du
Che. La faute à l’empressement avec lequel je me suis enfuie de
l’appart.
Leçon à retenir de tout ceci : si vous surprenez votre mec
avec une autre fille et que vous devez faire votre sac de survie
rapidement, ne choisissez pas votre commode spéciale vieilleries pour
le remplir.
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