mercredi 3 octobre 2012

Rorschach



Je suis une dinde. C'est officiel. J'ai commis le chair contre chair avec un individu de type mâle alpha. Pour cela il m'a suffit d'être morte d'ennui. Cela n'excuse rien.

Contexte: Mardi soir, soirée chez Marie et Tom. Je suis habillée tel le sapin de Noël j'ai des sequins pleins ma robe, la bouche rouge sang et les cheveux en mode sirène en état d'ébriété, je savoure mon chouchen glacé tandis que les baffles déversent des flots de dubstep survitaminé. Je ne sais pas pourquoi je suis venue, je connais tout le monde et je n'ai envie de parler à personne.

Hannah est déchainée sur la piste de danse c'est à dire le mètre carré de libre entre la table basse et le canapé. Ce faisant elle remue son popotin devant un parterre de mecs avinés et clairement en appréciation du spectacle. Plus loin Joa et Lisa se roulent des pelles monstrueuses depuis une heure et là encore je retrouve un autre groupe de mecs la bouche ouverte. Je finis le chouchen d'un trait et me sert de la vodka et du jus de framboise en me promenant dans l'appartement.



Appart pour le moins flippant. Marie et Tom sont le genre de couple "artistes." Sur chaque mur trônent leurs tableaux, sur chaque surfaces planes leur chef d’œuvres. Chef d’œuvres consistant généralement en espèce de reproduction géantes de tests de Rorschach ou poteries aux formes les plus contournées, étirées et étranges possibles. Je suis en pleine contemplation d'une toile depuis 5 bonnes minutes quand je sens une présence. Je me retourne avec précipitation et découvre un inconnu au t-shirt maculé d'un liquide rose-rouge qui goutte. Inconnu qui me fixe avec incrédulité. Je jette un rapide coup d’œil à mon verre pour la plus grande part vide et fais le lien.

S'ensuit un relatif silence si on oublie la musique qui fait vibrer les murs.

"Désolée, je souffle en m'écartant.
 Je m'apprête à partir quand il m'arrête.
- Attends. Qu'est ce tu voyais là dedans? dit il en désignant la toile du menton.
Je le fixe à mon tour, en me demandant en mon for intérieur le bien fondé d'une réponse à une telle question. Ce truc est un test psychologique déguisé, et si ça se trouve lui aussi est un psy déguisé. Ou pire: un étudiant en psychologie .
- Je sais pas si je dois répondre à ça...
- Ah ? fait-il en se tournant vers moi. Et pourquoi?
- Je veux pas répondre à ça non plus.
- Pourquoi?
- Je serais folle.
Le voilà qui sourit en plissant les yeux.
- Plus que maintenant?
- Beaucoup plus.
- Et si moi je disais ce que je voyais? Je serais fou?
- Ça dépends de ce que tu vas dire.
Son sourire s'élargit. Et il s'avance vers moi.
- Je vois un pingouin, deux grues, trois chats et une tache d'huile en forme d'Alaska...
J'écarquille les yeux et  hoche la tête, tandis qu'il me géolocalise sur la toile ses découvertes.
- Je confirme. Qui que tu sois, tu es fou.
- Oh..."

Il sort un joint de son paquet de clopes, l'allume, avale une grande bouffée de fumée puis me le tends. Je tire dessus et sent la fumée chaude dans mes poumons. Après quelques taffes mon corps entier se détends, ça fait du bien. Il se tourne vers moi  et me dévisage bizarrement.

- Quoi? je demande sur la défensive.
- Comment tu t'appelles?
- On s'en fiche.
- Ok...qu'est ce que tu fais ici?
- Je m'ennuie, je réponds en expirant.
- Moi aussi."

Je lui tends le joint et le regarde plus attentivement. Il est grand, aussi grand que moi, il a de grand yeux bleus , une mâchoire carrée et les cheveux noirs. Il me sourit. Il est beau. Je croise les bras et regarde mes ballerines en me mordillant la lèvre, je me mets sur la pointe d'un pied et je redescends. Je fais toujours fais ça quand je suis nerveuse. Soudainement je regrette que mon verre soit vide.

J'ai un étrange sentiment de culpabilité qui monte en moi.  Je n'ai pas regardé un seul garçon depuis Vile K. Je n'ai pas ne serait ce qu'envisager un gus depuis que j'ai déménagé il y a 3 mois. Et pas eu d'autres mec que K. en 3 ans.  J'avais oublié ce que ça faisait. Je lui reprends le stick des lèvres et tire une profonde bouffée en fermant les yeux. Quand je les rouvre, je vois son visage s'approcher et m'embrasser. Il passe ses doigts dans mes cheveux et sa main gauche me caresse le dos. La culpabilité mal placée se fait rapidement la malle, quelque part entre l'arrachage de robe à sequin et notre chute derrière la porte de la chambre.








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