samedi 17 novembre 2012

Material Girl



Résumé de l'épisode précédent: je me sens victorieuse et pleine de bossitude car enfin déniché mon stage. Malheureusement c'est l'heure de gloire de Benjamin (Coup du soir) aussi et ça se passe pile dans la même boite. Ne nous attardons pas sur la probabilité pour qu'une telle chose arrive, j'y ai déjà réfléchi et après un mal de crâne carabiné, j'en ai très sérieusement conclue que j'étais maudite. Conséquemment je ressens quelque chose comme un sentiment cuisant de persécution non légitime. Et j'ai cette phrase perfide et ô combien vrai qui tourne en boucle dans mon cerveau: "il m'a vue toute nue, et c'est un supérieur hiérarchique, je suis dans le caca, je vais me pendre." Sauf que je n'ai pas le temps d'approfondir mes envies de fuite suicidaire parce que j'ai trop de travail pour ça et une boss au summum du casse bonbons.

Je cours de ci et de là, en proie à ce que j'appelle le "mode frénésie contrôlée", j'ai l'impression d'avoir mille bras, je photocopie à qui mieux mieux, j'envoie des tas de mails à des inconnus, je fais des compte-rendus de réunion en affreuse compagnie (Aurore adôôôre être avec les mâles possédant le pouvoir)  et évidemment je fais du café.  Pas de tromperie ici, je vous avoue que je fais SURTOUT du café. Des litres et des litres. A se demander si ces gus percutent que la caféine est un  psychotrope, et pas de la flotte. Je vois Benjamin lors de ces réunions, et après une semaine où je le sentais me fixer tout en l'ignorant, la donne a changé. Apparemment nous avons décidé d'un commun accord de ne pas s'adresser la parole avec ce qui semble être une option spéciale ne pas croiser nos regards. Décision commune qui m'a réjouit, pour finalement m'ennuyer. Passer deux heures enfermée à noter les point forts d'une réunion en forme d’encéphalogramme plat est très chiant. J'ai voulu pimenter la chose une ou deux fois (bon d'accord une vingtaine de fois) en regardant de son côté mais en pure perte... Mes quelques tentatives d'harponnage oculaire se sont soldées par un échec.



Je dois dire...que je suis déçue. Soulagée, certes, parce que savoir que je n'aurai finalement pas à me soucier de son sourire en coin et de sa façon de me regarder comme si j'étais une espèce de fille particulièrement intéressante est une chose soulageante mais... justement. Le boulot est du coup beaucoup plus ennuyant. En plus de ça, je dois supporter les tentatives d'approche d'Aurore, ses tapotements sur son dos à lui, les grands sourires qui font vitrines sur ses rangées de dents parfaitement blanches, cette façon qu'elle a de lui coller ses appendices mammaires en plastique sous le nez dès qu'elle rejette la tête en arrière pour rire à ce qu'il dit. Comportement qui m'a inspiré un théorème : tête en arrière + flots de crinière blonde en cascade + dents en avant = attitude somme toute chevaline.

J'ai entretenu Hannah de ma déception mâtiné bon débarras et elle m'a fixé d'un regard scrutateur.

" Ne me dis pas que j'entends ce que j'entends.
- Quoi? je relève la tête que je tenais entres mes mains, avachie sur la table du café.
- T'es en train de tourner matérialiste.
- De quoi tu me parles?
- Le gars...coup du soir...tu le considères comme ta propriété.
- Pas du tout! je me rebiffes en me redressant complètement. Le gus peut bien faire ce qu'il veut avec elle, si il est intéressé c'est qu'il est une sombre arnaque et une imposture.
Elle soupire, en secouant la tête.
- Ma chérie, je t'arrêtes tout de suite parce que tu t'égares complètement. Le gus est un gus, d'accord?  Et si tu lui présente une paire de bonnet C, il va forcément être intéressé. Ce n'est qu'un humain après tout.

Je sirote mon chocolat en méditant sur ces sages paroles.
- La question est, continue t'elle en plissant les yeux, pourquoi est ce que ça t'emmerdes?
Je pose ma tasse, m’apprêtant à répondre l'évidente réponse quand je m'arrête et ferme la bouche.
- Alors? demande t-elle en penchant la tête sur le côté.
Je la regarde et mon cerveau est vide, il n'y a plus d'évidente réponse. Est ce c'est parce que j'ai couché avec lui? Parce que ce jeu du chat et de la souris me manque et que je m’ennuie ? Ou autre chose? Et soudainement, je comprends qu'elle a raison, je le considères comme ma propriété. Or, il ne l'est pas. Ce qui résous le problème.
- T'as raison. Je le vois comme "ma" chose. J'ai un côté très matérialiste, pour ce qui n'est pas à moi au fond, c'est ma façon d'envisager le monde, mon instinct de propriétaire a fait de moi une prédatrice, je dis d'une voix faussement mélodramatique pour faire passer la pilule. Je suis nââââvrââânte, ma pauvre chérie. Bon, cette découverte m'a donné faim, on se casse ? "

Pendant le repas, j'y repense et décide que c'est stupide, il n'est pas à moi. Qu'il fasse ce qui lui chante. J'en ferais de même.



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